À La Chassagnette, Armand Arnal a trouvé son port d’attache. Dans cette ancienne bergerie au cœur d’Arles, le chef étoilé cultive une cuisine d’instinct, éthique et profondément végétale. Une partition gastronomique du vivant, née d’un jardin en mouvement.
Né à Montpellier, formé auprès de Pierre Hermé et à New York dans les cuisines d’Alain Ducasse, Armand Arnal aurait pu s’inscrire dans la lignée des chefs voyageurs. Mais c’est en Camargue, au cœur des terres indomptables d’Arles, qu’il a trouvé sa respiration. Guidé par une rencontre décisive avec Maja Hoffmann, collectionneuse d’art et mécène, et par un coup de foudre pour cette ancienne bergerie devenue table d’exception, le chef a posé ses valises à la Chassagnette en 2006. Il y modèle une cuisine vivante et sincère, dont la partition compose avec les saisons et les produits d’un jardin de trois hectares.
C’est dans cet éden, où l’on entre par le verger, que tout commence. Là que chaque jour, Armand Arnal picore des éléments qui composeront sa cuisine, enrichie des trésors que lui confient les producteurs du coin.
On travaille beaucoup en amont avec les saisons. Au mois, à la semaine, et puis jour après jour. Il suffit de prendre un petit peu de temps pour écouter ce qui se passe et de cuisiner. Non pas dans l’addition des choses, mais dans l’harmonie des choses. À partir de là, les évidences arrivent.
Une cuisine d’instinct
À La Chassagnette, les menus s’établissent au rythme des rotations des cultures, dans une harmonie de saveurs où chaque recette trouve sa place. Cultivé selon les principes de l’agriculture biologique, le jardin produit des variétés anciennes et endémiques. Le potager jouxte une serre tropicale où papayes, bananes et mangues mûrissent aux côtés de jeunes pousses.
C’est à la source de ce jardin et d’une haute sensibilité que le chef puise l’inspiration d’une cuisine d’instinct, où le végétal domine. Ses voyages nourrissent sa mémoire du goût. Ils sont sa boussole.
J’ai la chance de connaître des gens partout. J’aime aller à leurs rencontres. Je me débrouille toujours pour faire le marché et cuisiner avec eux. J’ai deux règles quand je voyage. C’est de passer plus de deux nuits sur place, et d’avoir le temps de transformer un produit ou de goûter quelque chose. Je vois la nourriture comme une matière transformable beaucoup plus que quelque chose de l’ordre du territoire. Cela n’est pas mon intérêt. C’est pourquoi il est important pour moi de cuisiner pendant mes voyages. Parce que l’origine de la matière se comprend dans son élément et dans son univers. Je préfère voyager plutôt que de faire voyager la matière.
Une cuisine collaborative, plastique et créative
En cuisine, une équipe partage la même passion du geste et du lien à la terre. Les postes ne sont pas figés.
C’est une grande cuisine qui cuisine ensemble. Il y a eu des évolutions dans notre métier. Il y a eu, à un moment, un besoin de sectionner un peu tout, mais les choses doivent être pensées ensemble pour que cela fonctionne. Cette mentalité, de mettre le chef devant tout, m’ennuie. Le lieu doit avoir sa propre expérience.
Maestro d’un dîner surréaliste à Cadaques, commissaire d’exposition au dernier Festival du Dessin à Arles, co-auteur avec le designer Noé Duchaufour-Lawrance d’un menu autour de la mise en relation entre matières constructibles et matières comestibles, Armand Arnal aime confronter la cuisine à d’autres formes sensibles. Il la manipule comme un médium plastique, un processus dont l’art, complet, dépasse la recherche d’un équilibre de saveurs.
- La Chassagnette, Mas de la Chassagnette, D36 Route Sambuc, Arles.
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