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Sébastien Rath, DR

Sébastien Rath : « J’ai ce rapport très fort avec le territoire et les producteurs. »

Dans la lignée prestigieuse des chefs Christophe Ducros, Michel et Sébastien Bras et Franck Putelat, le chef Sébastien Rath signe le menu en six étapes de la 15e édition des Vignes Toquées, une balade eono-gastronomique les 24 et 25 mai 2025 dans les vignobles des Costières de Nîmes.

Sébastien Rath, a eu une première vie professionnelle de traiteur avant d’embrasser celle de chef plébiscité par le Guide Michelin. Couronnée d’une étoile verte en 2021 puis d’une étoile rouge en 2024, son identité gastronomique, sincère et créative, met le produit au cœur de l’assiette. Héritier d’une lignée de bouchers et de maquignons, ce cévenol dont l’exigence accompagne une passion pour le terroir est à la tête du Saint-Hilaire à Saint-Hilaire-de-Brethmas avec son épouse Gwladys.

ENTRETIEN

SUD VIBES : Vous avez décroché votre première étoile rouge l’année dernière, moins d’un an après avoir ouvert le Saint-Hilaire et après avoir obtenu une étoile verte. Qu’est-ce que cette deuxième étoile signifie pour vous ?

Sébastien RATH : C’est la récompense d’un travail de passionné, une fierté pour tout un village, mais aussi pour tous ceux qui, depuis le début, me voit croire en cette démarche. Avoir une telle récompense avec une maison qui grandit encore est le plus beau des encouragements. C’était tout à fait inattendu après notre déménagement. Ce déplacement était peut-être une épreuve à traverser pour se reconstruire et repenser les choses bien que cette étoile s’inscrive dans la continuité du travail mis en place avec Le Riche. Nous rêvons d’encore plein de choses et nous entretenons ce sentiment extraordinaire parce que nous sommes les premiers du territoire alésien à avoir une telle distinction. Cette étoile est le résultat d’un labeur, mais aussi de la constance. C’est une conséquence. Celle du travail de toute une équipe avec un chef, mais plus largement celle d’une maison et celle de mon épouse qui travaille avec cette détermination qui nous permet de grandir de jour en jour. Cela a toujours été un rêve et je souhaite à tous mes confrères passionnés de vivre un tel moment dans leurs vies.

SV : Comment est entrée la cuisine dans votre vie ?

SR : Assez simplement. Mon papa était boucher. Il cuisinait beaucoup et rêvait d’être restaurateur. Quelque part, j’ai traduit son rêve par ce qui est devenu ma vocation. J’ai été éduqué à l’amour de la cuisine et du partage. Si j’ai voulu faire ce métier, c’est simplement pour rendre les gens heureux. Pour partager un moment créatif, un moment où l’on se retrouve. Autour d’une table, en principe, tout se passe bien, même si c’est un travail qui demande toujours de se remettre en question. Nous ne sommes absolument pas dans l’acquis. Il s’agit d’une évolution qui, jusqu’à la fin de notre vie, sera à penser et à repenser pour pouvoir donner le meilleur de nous-même.

SV : Comment décririez-vous votre cuisine ?

SR : Je ne peux pas ignorer l’héritage de la boucherie, ce bagage familial que je porte avec fierté. J’ai un regard sur la viande et la charcuterie qui est assez précis. Je sais à peu près ce que je veux donner et ne pas donner. Aujourd’hui, je me révèle très à l’aise avec le légume et notamment dans le travail du salé fruité. J’aime amener ce côté fruit rafraîchissant dans mes plats. Des choses qui amènent de l’acidité ou de l’amertume pour contrebalancer, par exemple, la richesse d’une crème ou d’une sauce qui a été réduite avec du citron ou une baie rouge. On peut même parfois faire des infusions avec de la lavande ou du fenugrec.

SV : Vous êtes très engagé dans la valorisation du terroir et des produits. Pouvez-vous nous en dire plus à sujet ?

SR : C’est un chemin que nous menons depuis vingt-deux ans avec mon épouse. Nous avons travaillé neuf ans et demi comme traiteur, ce qui nous a permis de pouvoir faire deux jolis enfants qui sont aujourd’hui grands. L’un se dirige vers le métier de chef et l’autre vers celui de ferronnier. De père en fils, nous avons ce sens du commerce, cette envie de se nourrir du client qui est très grande et que l’on entretient encore aujourd’hui. Cet héritage a quelque chose de fabuleux et c’est une fierté locale puisque, Alésiens depuis 1883, nous avons toujours été dans le métier de la boucherie de père en fils. Mes arrières grands parents étaient éleveurs, maquignons. C’est la raison pour laquelle j’ai ce rapport très fort avec le territoire et les producteurs. Il s’agit d’un héritage, d’une éducation, mais aussi d’une sensibilité. C’est ce qui m’a valu très rapidement l’obtention de l’étoile verte, bien que je ne concourais pas. Cette démarche de valorisation du terroir et des produits était une évidence pour moi. Je n’ai jamais pensé autrement. Avant même d’avoir compris comment faire cuire un œuf et faire quelque chose avec du beurre, je savais qu’il fallait que l’œuf vienne de la grand-mère Antoinette et que quand le beurre venait du fromager, il avait une autre saveur.

 

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Gwladys et Sébastien Rath, DR

SV : Vous êtes le chef de l’édition 2025 des Vignes Toquées, organisées par les Costières de Nîmes. Comment avez-vous élaboré ce menu signature et quelles ont été vos inspirations ?

SR : Nous préparons cet événement en trois phases. La première phase a été réalisée en amont avec un testing sur quelques idées des viticoles afin de voir comment encadrer ma cuisine. C’était hors saison donc il a fallu faire preuve de souplesse avec les produits pour se frayer un chemin vers une idée qui aujourd’hui prend forme avec des fiches techniques que je transmets au traiteur Cabiron. Ce travail va nous permettre d’assurer la sérénité de l’envoi sur ce cas de figure atypique que sont Les Vignes Toquées. Chez nous, nous faisons vingt couverts. Nous avons notre rythme et une codification qui nous permet de très agréablement oxygéner notre service. C’est tout à fait différent de cet événement qui demande un nombre incalculable de redressages avec des postes qui sont en pleine nature, loin du confort que nous avons au restaurant. Ce qui est beaucoup plus compliqué dans cet exercice, c’est qu’il faut que je fasse attention, avec beaucoup d’humilité, de transmettre mes idées, mais de manière à ce qu’elles soient réalisables dans ces conditions. Nous pourrons avoir les associations de goûts, la codification et la colonne vertébrale de ma cuisine, notamment mon attachement pour l’oignon doux des Cévennes qui est toujours aussi fort, mais il faut comprendre que ce n’est pas la même manière de travailler. Il va falloir faire preuve d’un certain recul pour que le niveau soit à mon image, mais surtout que tout soit exécuté dans de bonnes conditions.

SV : Vous serez présent pendant l’événement ?

SR : Nous allons fermer le service du samedi midi pour être présents. Nous aurons fait le troisième testing, c’est-à-dire, après l’écriture et les fiches techniques, une dernière dégustation chez le traiteur. Je serai présent à l’événement mais plus par envie de partager et de voir les gens heureux de cet échange.

 

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Le Saint-Hilaire par Sébastien Rath

Le Saint Hilaire par Sébastien Rath, 5 Rue André Schenk, Saint-Hilaire-de-Brethmas.
Les Vignes Toquées, les 24 et 25 mai 2025.