Pascal Légitimus expose ses « Trésors Marins » à la Galerie Mailyn Bruniquel à Sète du 6 septembre au 8 novembre. Des photographies qui dévoilent une facette méconnue du comédien et humoriste. Images surréalistes, exotiques, tendres ou drôles… L’artiste passe derrière l’objectif et dévoile des mises en scène ultra-pigmentées où sa collection de coquillages rares tient le rôle principal. Entretien.
SUD VIBES : Pascal Légitimus, on vous connaît comédien, réalisateur, scénariste… Comment passe-t-on de la scène et des plateaux de cinéma à la photographie de coquillages ?
Pascal Légitimus : Je suis un homme d’images avant tout. Un créatif. Et cette idée, un peu parallèle, vient surtout de l’enfance. Dans ma prime jeunesse, je collectionnais les coquillages. Tout simplement parce que je trouve cela beau. Leurs couleurs sont chatoyantes, elles sont variées… Et puis j’ai appris un plus tard que le coquillage est aussi un symbole féminin, et que dedans, il y a le nombre d’or. Là, on touche à des choses un peu mathématiques, spirituelles, quantiques même. Et puis je suis fasciné par le monde de l’invisible. Par le fait que ce n’est pas parce qu’on ne voit pas certaines choses, qu’elles n’existent pas. Partant de tous ces concepts, j’avais collecté, au fil des ans et pendant mes voyages, à peu près 250 coquillages dans le monde entier.
Et puis un jour, avec l’envie de décorer différemment ma maison, j’ai mis en scène et pris en photo l’un de mes coquillages. Les amis qui venaient à la maison les trouvant jolies et me proposant de les exposer, je me suis dit que j’allais tester. J’ai vendu trois photos à Drouot via un commissaire-priseur. Et puis j’en ai fait d’autres. La première exposition a eu lieu par l’intermédiaire d’un ami à la Maison Bouquet à Roanne. Cela fait trois ans que je fais des expositions. J’ai aussi créé un site pour que les gens puissent voir mes photos et éventuellement les acheter. J’ai pris 150 photos avec différentes thématiques.
Je mets en scène les coquillages dans des situations, dans des lieux. Il y a toujours une correspondance entre la forme ou la couleur et l’environnement. Et puis il y a toujours un trait d’humour. On ne se refait pas… À Roanne, une amie m’a parlé de la Galerie Maïlyn Bruniquel. Tino Di Martino, qui m’a fait venir à Sète pour une dédicace, m’a dit que la galerie pourrait être intéressée par mes photos. Fort de tout cela, je serai à Sète le 6 septembre pour le vernissage de l’exposition.
SV : Vos coquillages sont mis en scène. Est-ce l’homme de théâtre et de cinéma qui s’exprime, ou est-ce plutôt le collectionneur et photographe ?
PL : C’est la créativité ! C’est-à-dire que j’ai un œil et que je vois tout de suite comment je peux mettre en scène, didposer. Par exemple, l’une de mes photos a été prise dans mon jardin sur le fond d’une poubelle verte qui récolte de l’eau. Il y avait à peu près un centimètre de glace dessus. J’ai posé mon coquillage dessus, j’ai attendu qu’il y ait un bel éclairage et j’ai pris trois ou quatre photos. Ça donne un truc un peu surréaliste, très pictural, parce qu’il y a des gouttes d’eau figées dans la glace. Et puis ce coquillage-là avec ces couleurs qui ressortent et le fond vert avec une perspective… Ça donne quelque chose d’assez beau. Je retouche à peine mes photos, en poussant un tout petit peu le chroma pour que les couleurs ressortent. Il n’y a pas de retouches et de bidouillages derrière.
SV : Prenez-vous vos photos avec un appareil en particulier ?
PL : Je prends les photos avec mon iPhone. Et puis j’ai un CANON.
SV : Qu’est-ce qui vous fascine le plus dans un coquillage ? Est-ce son esthétique, sa dimension sensuelle, son histoire ?
PL : Vous avez tout dit. Avant Jésus-Christ, le coquillage était une monnaie d’échange. Comme l’euro ou le dollar, il avait une valeur. Ensuite, il est devenu un ornement. Et puis il nourrit. Mais ce qui me fascine, ce sont ses formes. Il y a des formes de coquillages et des couleurs qui sont incroyables. Et le quatrième élément, c’est le fameux nombre d’or. La sculpture du coquillage est parfaite. Ce n’est pas anodin. C’est-à-dire que la petite bébête qui fabrique son calcaire et qui s’entoure de cette petite maison comme une tortue, comment fait-elle pour que sa maison soit mathématiquement parfaite ? Ce nombre d’or se trouve partout, dans les tournesols, dans les alvéoles que fabriquent les abeilles, dans les arbres, dans leurs feuilles.
« L’Homme de Vitruve » de Léonard de Vinci illustre ce nombre d’or. C’est le sens des proportions. Autrement dit, si vous prenez, par exemple, le début de votre poignet jusqu’à votre coude, la mesure est celle de votre pied. Tout cela pose des questions. Qui a fait que l’univers entier a été construit sur le nombre d’or ? Quelle est l’histoire derrière cela ? D’où vient-on ? Je trouve toutes ces questions très intéressantes. Et le coquillage m’amène à ça. Ce n’est pas que la sculpture, c’est aussi que spirituellement, cela ouvre des portes.
SV : Vous souvenez-vous du premier coquillage qui vous a attiré au point d’être le premier de votre collection ?
PL : C’était certainement une praire. Enfin un truc assez basique, parce que c’était à La Baule, je pense. Je devais avoir 14 ans. Un tout petit coquillage blanc, qui avait plusieurs couleurs, qu’on trouve aussi à Deauville. Et après les Seychelles, Maurice, Tahiti, Nouméa, l’île des Pins, l’Indonésie, toutes ces îles qui permettent de voyager.
SV : Les mises en scène de vos coquillages ont-elles vocation à raconter des histoires ? Sont-elles purement esthétiques ?
PL : Je ne raconte pas d’histoires. Je veux que chacun imagine la sienne. Comme chacun a sa propre interprétation d’un tableau. Je mets les coquillages en scène en me disant, « tiens, c’est joli comme ça », il y a du sens peut-être ? L’une de mes photos de coquillage s’appelle » Smile » parce qu’on a l’impression qu’il sourit.
Un autre est posé devant un tronc d’arbre. Je ne sais plus dans quel pays, mais ce qui est amusant c’est que dans le coquillage il y a un visage. C’est-à-dire qu’on voit un nez, une paire d’yeux et une bouche. Sur l’autre face du coquillage, à droite, on voit un museau de chien et dans l’arbre, si on regarde bien, on voit un regard. Il y a une paire d’yeux avec un nez comme un Hobbit qui regarde le coquillage ou qui nous regarde. Il y a donc trois visages dans la photo. Si on est attentif, on le voit, sinon, on ne voit rien. En tout cas, ce qui est intéressant, c’est que 99% des gens disent trouver cela beau et y voient une fenêtre sur la nature. Aujourd’hui, comme le monde est assez anxiogène, dans ce chaos, avoir de belles images fait du bien.
SV : On imagine que le public qui se déplace lors de vos vernissages, vient aussi voir Pascal Légitimus l’acteur et humoriste… Comment vivez-vous ce décalage entre la célébrité du comédien et la reconnaissance naissante du photographe que vous êtes devenu ?
PL : Je ne fais pas de différence. Je suis toujours moi-même. Parfois les gens plaquent une image sur moi. C’est-à-dire qu’ils ont une image de moi en 1990, et puis ils ressortent la photo en 2025. Est-ce que c’est la même ? Eh bien, c’est la même photo, sauf que ce n’est pas le même parcours, ni le même process. Ils sont étonnés et en même temps me disent que cela me ressemble. Les gens sont curieux. Les gens intelligents sont aimants dans les deux sens du terme. Je ne vais pas leur en vouloir de m’aimer. S’ils m’aiment, tant mieux ! Et puis s’ils aiment en plus ce que je fais, eh bien voilà, c’est une victoire.
SV : Continuez-vous votre collection de coquillages ? Sont-ils des prétextes aux voyages ?
PL : Quand je voyage maintenant, j’ai des dealers. Parce que c’est devenu compliqué de ramener des coquillages. Il y a des interdictions. J’en achète parfois. Il faut un certificat. Mais surtout, je connais des collectionneurs. Dans la ville de Chelles, en banlieue parisienne, il y a tous les ans une exposition de conchyliologues du monde entier. Certains coquillages rares valent 2000, 4000, 5000 euros… Il y a des échanges, des partages et évidemment, ils sont intéressés par mon travail parce que je crois que je suis l’un des seuls au monde à faire ce genre de process. Je me suis renseigné et il n’y a personne qui photographie les coquillages comme je le fais. Donc à présent, je m’ouvre à l’international. C’est pour ça que j’ai ouvert un site internet.
SV : Quels sont les « Trésors » qui seront dévoilés à la Galerie Maïlyn Bruniquel ?
PL : Il y aura des tirages sur toile, un autre de mes process qui donnent quelque chose d’assez pictural et de particulier. Il y en aura 7 ou 8. Et puis une quinzaine de photos encadrées. Des grands tirages.
- Les Trésors Marins de Pascal Légitimus, du 6 septembre au 8 novembre 2025, Galerie Maïlyn Bruniquel, 1 Quai Adolphe Merle, Sète.
- Vernissage samedi 6 septembre à 18h.
- + d’infos : ARTIMUS