Pina Bausch "Palermo Palermo"

Le rideau se lève, un mur tombe. En décembre 1989, date de création de Palermo Palermo, et bien que Pina Bausch s’en défendît, il était difficile de ne pas penser à celui de Berlin. Bien sûr, la chorégraphe et son scénographe Peter Pabst avaient imaginé ce « coup de théâtre » bien des mois avant les événements berlinois et, selon elle, il s’agissait des « murs invisibles qui existent partout dans le monde, dans nos têtes ». Étrange prémonition venant confirmer, une fois de plus, que la danse pourrait être le sismographe du monde.

Ce mur qui s’écroule ouvre en fait de nouvelles perspectives. Dans la pièce comme dans le parcours artistique de Pina Bausch. Quand le nuage de poussière se dissipe, apparaissent alors des hommes et des femmes triomphants et blessés, des veuves éplorées, des garçons déboussolés et parfois violents. Chacun des vingt-deux interprètes vient sur le devant de la scène exécuter son numéro, le plus souvent absurde, des gags laissant place à un humour tendre et triste. Sable rose, déchets divers, chant des cigales et cloches palermitaines ouvrent un espace de réminiscences fait de textures, de bruits, d’odeurs.

Palermo Palermo, pièce puissante, d’une force visuelle peu commune, deuxième de la série réalisée en résidence dans les villes étrangères, affirme avec sa succession de saynètes, un tournant dans l’œuvre de Pina Bausch. Des cendres du dynamitage inaugural, émerge la brusque limpidité d’une danse absolument nouvelle, qui va aller en s’allégeant. Pourtant, dans ces gravats, ces arbres renversés, ces ordures éparpillées, Pina Bausch nous disait déjà que l’homme se condamne à disparaître avec la nature, et que cet univers cruel et post-apocalyptique pourrait bien être encore le nôtre.

Agnès Izrine

Tarif : 5 à 60 €